(note à Braisou : Hivernou et Braisou ne sont du coup pas encore au courant de leur lien familial, faudra repousser ça à la fin de l'évent, dans un certain moment, donc pour l'instant ils peuvent très bien ne pas être en super bons termes x'))

Entre chien et loup, la chute du jour annonçait un départ imminent vers les rochers des assemblées. Je voulais être le premier à arriver, comme toujours. L'obscurité de ce soir me faisait perdre tous mes repères. Qu'est-ce qu'il faisait froid, et sombre, et qu'est-ce que la nuit était tombée vite : je n'avais même pas eut le temps d'admirer le crépuscule et ses teintes rose-orangées. Bon, peu importe. D'un air décidé, je nommais à tour de rôle les chats qui allaient me suivre ce soir vers ces fichus rochers. Je parlais d'un ton acariâtre et acerbe, mais j'avais mes raisons d'être aussi sec et maussade. L'automne était là, et les feuilles ne permettaient plus de nous masquer pour chasser. Mais le tas de gibier était haut, alors je me dit que ce n'était peu être pas ça qui agrémentait mon humeur de haine. Sans que je m'en rendis compte, mes griffes étaient elles-même sorties entièrement de mes pattes. Un vent froid me fit frémir, et l'espace de quelques secondes, je me sentit faible. Il est vrai qu'il ne me restait qu'une vie, ah ! J'avais oublié ce détail, à force de dire à mon clan qu'il m'en restait 4. J'avais perdu l'avant-dernière il y a très peu de temps, dans le plus grand secret bien sûr, en tombant des falaises à marée basse. J'aurais pu mourir pour toujours s'il y avait eut l'eau agitée en dessus, et me noyer, et mourir dans les profondeurs abyssales de la mer, oublié de tous. Pas question, je voulais une mort glorieuse. Le sable en dessous de moi avait amortit un peu, mais je n'avais pas eut le temps de me retourner entièrement, car je commençais à être vieux en cette vie-là, et donc je perdais de mon agilité. J'était tombé sur le flanc et avait agonisé près d'une heure, les os brisés. Quand je comprit que si on me soignait, je ne pourrait plus rien faire en cette vie, je fermais les yeux pour mourir et la perdre. Mes os se réparèrent, et je me sentit à nouveau en pleine forme au bout de quelques jours, près à combattre et feuler des pics aux ennemis.
Mon pelage dans la nuit, cette fois, ne brillait pas de son éclat blanc. Peut-être la lune ne devait-elle pas envoyer assez de lumière pour ça, mais peu importe, la lune ne m'intéressait pas. Et tandis qu'on marchait vers les rochers des assemblées, je sentis le regard de quelqu'un sur moi. Me retournant, je vis un guerrier - je mis quelques secondes à reconnaître Œil de Persil, qui me fixait avec un regard effarouché. Voyant que j'avais remarqué qu'il me fixait, il détourna le regard et détala en fin de file. Pourquoi avait-il cet air étrange, qu'avait-il vu au juste sur mon pelage ? Je m'arrêtai quelques secondes, laissant à ma lieutenante, Lune d'automne, le soin de prendre la tête du groupe pour guider le clan de la Lune. M'approchant d'une flaque, je vis sur moi des marques de sang et des griffures partout sur mon corps. Qu'étais-ce... ? Seulement aussitôt, elles disparurent. Ouf, ce n'était qu'une pauvre hallucination. Ou... un message du clan des étoiles ? Pff, non, en quoi me recouvrir de sang était un message. J'avais juste des problèmes de vue, dans ce noir total. Pourtant... Œil de Persil devait avoir vu à peu près la même chose que moi, non ?
Me penchant à nouveau vers la flaque d'eau, je vis mon reflet - désormais tout à fait normal - se brouiller pour laisser place à des images. Intrigué, je vis les rochers des assemblées se dessiner dans la flaque. Une sorte d'ombre blanche s'y baladait. Un chat blanc et lumineux comme la lune sautait de rocher en rocher. Puis une nouvelle image vint. Cette fois, c'était une chatte, couché, le regard éteint et vide, au milieu d'autres cadavres. Je frémis à peine. Non, le pire était à venir. Enfin, à la fin du message du clan des étoiles, une odeur horrible monta dans l'air. La flaque d'eau était devenue flaque de sang. Du bon sang de chat rouge foncé à noir dans la nuit, dégageant la pire odeur possible. Dégoutté, je détalai pour rattraper le groupe qui marchait loin devant.
Nous arrivâmes enfin, et je ne pus que me délecter d'être le premier arrivé. Le clan prit place parmi les rochers alors que je grimpais le plus haut pour surmonter tout le monde. Je me surpris à chercher du regard ce chat lumineux qui sautait partout dans ma vision, puis je secouais la tête. Cette vision n'avait aucun autre intérêt que nous annoncer un hiver douloureux. Peut-être le chat blanc représentait le mal blanc qui sautait de rocher en rocher comme le chat en chat, pour rependre son courroux de maladie dévastatrice ? Le clan des étoiles n'irait tout de même pas à faire des métaphores aussi peu inventives ? Au fond de moi, je savais que cela signifiait autre chose. Quelque chose imminent, de douloureux, et de pire qu'une épidémie.

-Salutations Etoile d'Hiver. J'espère que le Clan de la Lune se porte bien.

Je tournai la tête vers Etoile de la Mélodie qui prenait place sur le rocher des chefs. Je ne me rappellais pas avoir déjà parlé longtemps avec cette chef. Je connaissait mieux Etoile de Myosotis, qui l'avait précédée. Pourtant cela faisait maintenant un moment qu'elle avait la place de chef au clan de l'arc-en-ciel. Qu'est-ce qui nous avait empêché de discuter jusque là ? J'avais totalement oublié ma vision quand je lui répondis gentiment :

-Salutations. Mon clan se porte très bien, merci. Qu'en est-il du clan de l'Arc-en-ciel ?

Simples politesses de début de discussion, elle allait forcément me répondre que son clan allait bien.
Je jetai un regard à la foule de chat en bas de nous. Tous les clans étaient maintenant là. On avait encore un certain temps pour que tous discutent ensemble, puis il faudrait faire le monotone discours des naissances et des baptêmes faits dans le clan. Non vraiment, c'était ennuyant...

Une légère bise du Nord soufflait sur les rochers. Et je vis comme des lumières traverser la poussière que le vent déposait par bourrasques sur nous. Pendant quelques secondes, pleins de points scintillèrent entre les chats, c'était magnifique. Comme un jeu de lumière, les étoiles éclairaient les grains de poussières et se reflétaient dans les yeux des chats, c'était très beau et à la fois cela me donna vaguement envie de briser un peu toute cette sérénité. Je sentais une sourde colère qui montait petit à petit dans la soirée en moi. Un énervement sans source particulière.